Il est inadmissible que ceux qui défendent le droit à l’aide à mourir imposent ce droit à ceux qui sont profondément contre.
Une des caractéristiques de notre société est la pluralité des croyances liées à la notion de Dieu : christianisme, islam, judaïsme, athéisme, agnosticisme, etc. Ces croyances n’étant pas issues de points de vue objectifs et faisant partie de l’identité des individus et de leur communauté, il convient de les respecter afin de favoriser la paix. Le principe éthique du droit à sa croyance repose sur ces considérations et la liberté de culte est donc protégée par la loi de notre république.
Les différentes valeurs que les individus attribuent à leurs propres vies ne sont pas plus objectives et souvent liées à leurs croyances religieuses.
D’une part, il y a ceux qui croient « en toutes circonstances la vie mérite d’être vécue », qu’« il n’y a que Dieu qui puisse prendre une vie », que « la souffrance en fin de vie est une épreuve ultime d’humilité », que « l’aide à mourir ne peut pas être considérée comme un soin », etc.
D’autre part, il y a ceux qui croient que « dans certaines conditions la vie ne vaut plus la peine d’être vécue », que « mon corps m’appartient », que « personne n’a le droit de me forcer à endurer des souffrances que je juge insupportables », que « l’aide à mourir fait partie des soins », etc.
Il y a des penseurs de renommée dans chacun des camps et il n’est généralement pas possible de persuader les membres d’un camp que ceux de l’autre camp ont raison, tout comme il n’est pas possible de persuader les membres d’une croyance religieuse qu’une autre croyance est la vraie.
La solution la plus raisonnable serait donc de donner une légitimité aux deux points de vue. De la même manière que l’on accepte qu’une personne ait le droit d’adhérer au culte de son choix, ne devrait-on pas accepter qu’une personne ait le droit de décider quand sa vie ne vaut plus la peine d’être vécue et le droit de choisir la manière dont elle veut mourir ? La coexistence de différentes croyances religieuse est possible tant qu’un culte n’essaie pas d’imposer sa vision aux autres. La coexistence de différentes conceptions de la fin vie est possible tant qu’on n’impose pas une fin à ceux qui ne le souhaitent pas, ou tant qu’on n’impose pas de vivre à ceux qui veulent en finir avec leur vie. Comme établi ci-dessus, un droit au suicide assisté et à l’euthanasie ne signifie pas qu’il y ait devoir de s’y soumettre.
Il convient donc d’inverser l’affirmation du début : il est inadmissible que ceux qui sont contre un droit à l’aide à mourir imposent leur vision à ceux qui sont en faveur. La justesse de cette affirmation s’exprime clairement de la façon qui suit :
Si le suicide assisté et l’euthanasie sont interdits, une partie de la population se voit privée de la possibilité d’agir selon sa propre croyance et sa propre conception de la vie et de la mort. Légaliser ce droit ne prive personne de sa liberté : ceux qui sont en faveur du principe de l’euthanasie peuvent choisir de vivre ou de mourir en fonction de leur état et de l’évolution de leur ressenti, et ceux qui sont contre choisiront de vivre jusqu’au bout quelles que soit leurs souffrances.